lundi 21 février 2011

Doha - Bahreïn : 126 kms. Mais Al Jazeera est à mille lieues ..


A la suite des mouvements populaires de contestation politique ayant lieu actuellement à Bahreïn, les chefs de la diplomatie des pays du Golfe (l'Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis, Oman, le Qatar et le Koweit) se sont réunis le 17 février dans le cadre du Conseil de coopération du Golfe. Craignant un éventuel effet domino, notamment après les épisodes tunisiens et égyptiens, ces derniers ont assuré les autorités de leur voisin de leur soutien en déclarant : « Notre sécurité est une responsabilité collective, il n'est pas question d'accepter des ingérences étrangères ». 

Rappelons un instant que parmi ces soutiens figure l'émirat du Qatar. Celui-ci finance une chaîne satellitaire d'information, Al Jazeera (une des concurrentes de CNN, BBC, Euronews et France 24). Or, cette dernière, diffusée à travers le monde tant en langue arabe qu'en version anglaise, s'est montrée particulièrement active lors des révoltes en Egypte, proposant une programmation quasi exclusivement consacrée à cette actualité, et ce pendant deux semaines, au point que les dirigeants américains suivaient en permanence ce qui se passait chez leur allié via ce canal.

En raison de cette couverture en direct, et très orientée en faveur des manifestants, le bureau d'Al Jazeera au Caire dut fermer ses portes. Les journalistes de la chaîne du Qatar furent même agressés dans la rue et leur matériel détruit. Le motif de ces agressions ? "Ingérence étrangère"! 

Et voilà donc qu'aujourd'hui, le gouvernement du Qatar se plaint à son tour de cette "ingérence" dans les affaires intérieures de son voisin le Bahreïn. Al Jazeera n'est pas en reste puisque sa couverture des événements dans les rues de la capitale abritant le commandement de la Vème Flotte américaine n'a rien à voir avec celle consacrée à l'Egypte ou maintenant à la Libye. Aucune couverture en continu. Seulement quelques reportages mettant cette autre révolte au même rang qu'un autre événement dans la hiérarchie de l'information. 
 Il n'est fait aucune mention de la révolte à Bahreïn dans les principaux titres. 
Le 21 février 2011 - 17h30 GMT


Cela peut se comprendre. Le Qatar n'a aucune envie de voir le domino de la révolte atteindre le Golfe Persique, et par là encourager les minorités chiites à remettre en question des émirats ou des royaumes dans lesquels les sunnites sont au pouvoir. De plus, les intérêts économiques sont si importants que la moindre étincelle révolutionnaire risquerait non seulement de déstabiliser leur pouvoir, de porter atteinte au portefeuille des familles régnantes dans cette région, de trop bouleverser les cours du pétrole, mais aussi de renforcer l'influence iranienne. Et cela, ni les Occidentaux, ni leurs alliés arabes locaux, ni les Israéliens ne le souhaitent. 

jeudi 10 février 2011

Belgique : après les tueurs en série, les grèves en série

N'ayons pas peur des mots ! La gente dame qui propose de faire la grève du sexe en Belgique, tant que la situation politique locale n'est pas stabilisée, ne manque vraiment pas de culot !

L'idée qu'elle soumet, eu égard à certains éléments apparaissant sur la vidéo ci-dessous (in)disposée, c'est un peu comme si une malheureuse victime de surendettement, totalement ruinée et interdite de chéquier et de carte de crédit, menaçait le Crédit Agricole, la Société Général et autres BNP Paribas de retirer séance tenante toute son épargne... 

Alors après ces propos absolument scandaleux pour lesquels j’ai d’immédiatement entrepris de me repentir auprès de l’ayatollah local, j'ai également décidé de soutenir, oui de soutenir ! (ce qui ne veux pas dire que je suis derrière elle...) la sénatrice belge Marleen Temmerman. Car après tout, elle n’a peut-être pas tort. Pourquoi ?

1- Parce qu'il ne faut pas se fier aux apparences. La grève du sexe est susceptible de la concerner (ça c'est pour éviter un procès..).
2- Comme elle le rappelle si bien, cette idée mise en oeuvre au Kenya en 2009 avait permis au pays de sortir d'une impasse politique, les mâles locaux n’en pouvant plus de se retenir et de prier le Seigneur. Bon.. certes.. depuis l'eau a coulé sous les ponts de Nairobi, et les méthodes post coïtales ont repris le dessus : corruption et assassinats politiques sont redevenus monnaie courante (Sources : Wikileaks et Le Monde). 
3- Parce que grâce à vos grèves belges à la .. belge, les nôtres apparaissent in fine comme particulièrement raisonnables..  et rien que pour ça, on est bien contents de vous avoir comme voisins. 


"Une grève du sexe, comme au Kenya"
envoyé par Europe1fr. - L'info video en direct.

mercredi 2 février 2011

Egypte / USA / Israël : un peu trop mou Barack ?

Les Etats-Unis et l'Egypte entretiennent des relations diplomatiques particulièrement étroites, notamment depuis une trentaine d'années et les accords de Camps David de 1978 qui ont donné lieu, un an plus tard, à un traité de paix entre Israël et l'Egypte, élaboré sous la houlette de Washington. 

Le partenariat géostratégique qui en découla permit aux Etats-Unis d'ancrer davantage encore leur présence au Moyen-Orient, en appui de l'allié israélien. Pour remercier Anouar el-Sadate (et oui..ça date..), une aide financière est depuis ce temps versée par les Etats-Unis au pays des pharaons (plus de 1,3 milliards de dollars annuels) et des accords de coopération militaire assurent au régime égyptien une protection face à d'éventuels ennemis arabes de la région rancuniers vis-à-vis du raïs d'avoir fait voler en éclat l'unité arabe, contre Eretz Israël, que Nasser avait contribué à construire.

Pendant trente ans, tant Anouar el-Sadate que Hosni Moubarak ont construit un système politique autoritaire sur le dos du peuple égyptien mais parallèlement, ils ont contribué à assurer une certaine forme de "stabilité" dans la région. Les USA et Israël ont favorisé le maintien d'un régime quasi dictatorial qui s'est appuyé sur une police politique particulièrement zélée plongeant des dizaines de millions d'individus dans la précarité matérielle et spirituelle, afin de garantir indirectement la sécurité d'Israël et des voies de communication garantissant le transit maritime de l'or noir vers les ports occidentaux.

L'Egypte n'est d'ailleurs pas la seule dictature du Proche et Moyen-Orient soutenue, protégée et financée par les USA. Un paradoxe pour une grande démocratie? Non. Juste du cynisme, de la realpolitik telle que la pratique toutes les grandes puissances de la planète. Difficile de faire la leçon aux américains.. surtout quand on est une ancienne puissance coloniale. 

La situation a cependant évolué depuis la révolution du Jasmin en Tunisie. La rue arabe, fatiguée d'être soumise par tant de régimes autoritaires, semble s'être réveillée un peu partout, à des degrés divers, sur l'ensemble de l'arc arabo-musulman: Yemen, Syrie, Jordanie. A ce jour, l'Egypte constitue l'épicentre de la révolte. Des millions d'égyptiens ont manifesté pour réclamer le départ de leur président. 

Beaucoup de pays, y compris les USA, ont manifesté leur souhait de voir la transition démocratique s'effectuer en Egypte dans les meilleurs délais. A la grande surprise d'Israël, dont certains hauts dirigeants ont accusé le président Obama de les trahir en laissant tomber l'allié Moubarak au profit des manifestants anti-Moubarak. Pour justifier leurs accusations particulièrement graves, les israéliens agitent quelques épouvantails : les frères musulmans, un nouvel Iran des mollahs à leur porte, l'instabilité dans toute la région, et à terme la mise en danger territoriale de leur pays. 

Barak Obama est particulièrement courageux de soutenir si clairement l'opposition égyptienne, alors qu'à Tel Aviv, personne ne souhaite le départ de Moubarak. Il est trop tôt pour prédire quelle sera la situation en Egypte dans les prochains. Mais les Etats-Unis jouent à un jeu dangereux pour eux. A moins de jouer simultanément sur plusieurs tableaux (ce qui reste dans le domaine du possible), la réalité politique interne égyptienne risque de totalement changer leur politique extérieure dans cette région du monde. Soit Moubarak tire rapidement sa révérence, et la transition démocratique se met en marche, quitte à prendre son temps, avec le risque de voir les Frères musulmans remporter les élections. Mais après tout, vox populi vox dei. Et l'image des USA n'en sortirait que grandie dans l'opinion publique arabe. Soit, le système Moubarak se maintient après son départ prévu en septembre 2011 (pourquoi pas soutenu par des puissances émergentes telles que la Chine déjà fort présente sur le continent africain..), et le camouflet risque d'affaiblir durablement l'influence américaine dans la région, qui n'est déjà pas à son maximum, notamment dans l'opinion publique arabe.

Dans les deux cas, ce sont les relations israélo-américaines qui risquent de pâtir de la situation. Mais comment reprocher à un pays d'accéder à la démocratie, si tel est vraiment le cas? Les mouvements islamistes naissent justement du manque de démocratie et de prospérité. Israël devrait montrer davantage d'optimisme face à ces mouvements populaires. Pourtant, M. Netanyahou privilégie le maintien de Moubarak au pouvoir. Comment Israël va justifier un tel positionnement dans le futur ? 

En attendant, les pierres volent Place Tahrir entre pro et anti-Moubarak. De là à rebaptiser la place du nom de Saint-Pierre du Caire.. il n'y a qu'un pas que Moïse hésite encore à faire.

Carte de situation (DR)